lundi 21 avril 2014

Billy Bruyère




à Amy Road...



J'attends le ferry dans une Renault de tôle bleutée,

Dans le ciel les mouettes se font bercer par l'air iodé,

J'irais aussi loin que voudrons me porter ces quatre roues,

Peu importe comment, une chose est sûre : j'irais jusqu'au bout,

Aujourd'hui, le soleil couchant m’accueillera à Tanger,

Sur le pont, lumière cinglante et envie d'arriver,

Meknès et Fès m'attendent et dans quelques mois je serais parti,

Pour Manhattan, Johannesburg ou encore vers l'Asie,

Si tu me cherches suis mes empreintes dépareillées sur la plage,

On parlera avant l'arrivée des ombrageux orages,

Tu verras peut-être que je ne suis pas comme on le dit,

Ils disent que je suis brusque, sauvage et même impoli,

Que je fuit l'amour et déteste les mioches et l'armée,

Que je n'ai qu'un cœur de roc dans un corps névrosé,

Certains pensent que le Mistral m'a fait perdre la raison,

Que je n'ai pas d´équilibre et vis au grès des saisons,

Aussi que de ma bouche ne sortent que des mots impies,

Que j'en vient à être paradoxal et n'ai pas d'amis,

Pour mes détracteurs j'étais un danger pour la vie civile,

« À plus jamais Billy Bruyère » me disaient-ils,

C'est pourquoi je suis parti il y a quelques années déjà,

Ce jour de décembre où la pluie glissait sur les toits,

Pour les miens, cette pluie est une véritable source de vie,

Sous les gouttes éclatantes j'ai dû dire adieu à mon pays,

Souvent ils ont voulu me priver des confins de la mer,

Mais désormais je préfère refouler les mots amers,

Même s' ils ont voulu faire oublier chaque pore de ma peau,

Par monts et par vaux j'ai laissé une trace de mon écho,

Je suis un exilé partout et nulle part à la fois,

Un chien lassé d 'une société qui dicte ses lois,

Une société qui ne veut que torpiller notre âme d'enfant,

Avec des responsabilités, un boulant accablant,

Usant nos os et notre âme pour des boss à la con,

Mais alors si l'on aime pas ça, pourquoi le fait-on ?

Face à nous notre vie : on ne sait par où il faut qu'on la mène

Il faut choisir : Faire honte ou servir la nature humaine ?

Chacun sa réponse mais s'il vous plaît, laissez-nous choisir,

Laissez-nous penser, en fin de compte, laissez-nous grandir,

C'est l'impatience tyrannique des montres que je fuit,

Me perdant partout, un déserteur moderne je suis,

Mais je penserais à vous ce soir face à la grande ourse,

Dans les champs de coquelicots, face aux vagues et leur mousse,

Marchant dans le Rif marocain, les pieds dans les genêts,

Chantant sous les étoiles lors des longues veillées,

J’ôte mon manteau dont les manches sont déjà bien usées,

Les bottes qui tant de ruisseaux m'ont aidé traverser,

Les chaussettes qui depuis des mois ne quittent plus mes pieds,

Des objets fétichistes dont je ne m'étais jamais séparé,

Je me retrouve face à ce monde qui est si étendu,

Mais aussi face à vous la main sur le cœur, l'âme à nu

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