vendredi 9 mai 2014

Doigts de pianistes- Atacama


Un slam d'Atacama...

 

Doigts de Pianistes



Au ciel une nuée noire

Au sol la tôle qui se tord

Des silhouettes dans le soir

Des voix qui hurlent à la mort.

Les pas de quelques courageuses âmes accourent

Tendant vers lui leur main qu'il leur rend en retour,

Sa rue brûle, il lui semble que la ville entière

Se consume autour de lui et son petit frère.

Est-ce une autre guerre? Est-ce une nouvelle Troie?

Est-ce un coup d'état, un nouvel assassinat?

La réalité lui prend son enfance,

Et poignarde, égorge son innocence,

Car c'est des bois que sont venues les flammes

Ces bois où il n'est plus rien qu'un quidam

Où il aimait tant jouer étant enfant,

Étant enfant... il n'y a pas si longtemps.

Il cache son visage dans une couverture

Une laine prêtée qu'on viendra lui reprendre

Cherchant comme un aveugle la couleur azur

Du trouble et obsure firmament aux pleurs de cendres.



Deux pianistes auraient des doigts de trop

S'il ne jouaient qu'avec son si jeune temps

Deux pianistes qui jouent alegretto.

À Valaparaiso un quartier est mourant.



Ses joues brûlées par le Soleil et le Froid

Qu'elle a subi dans l'air sifflant de Puno

Elle longe en trébuchant le bord de l'eau

Ce rivage qu'elle connait depuis des mois.

Une mèche de cheveux lui voile le front,

La main qui la repousse est enfantine

Alors que dans sa paume brille un bonbon

Qu'elle voudrait vendre aux heures matines.



Un pianiste aurait quatre ou cinq doigts de trop

En ne jouant qu'avec ceux qui comptent sa vie

Tragiquement rien de sonnerait faux

Si ces doigts n'effleuraient la touche polie.



Les bras de sa mère le tiennent tout contre elle

Le visage triste, et la voix un peu frêle

Elle interpelle lassement les passant

Qui statufie près d'elle, volontairement.

Elle n'a pourtant pas les yeux de Méduse

Ses iris jadis en fleur aujourd'hui fânées

Ne cachent aucune haine aucune ruse

Simplement ce doux désir de sérénité.

Un geste de coûte rien, une pièce ce n'est rien.

Mais orgueilleux, forts et fiers de leur titre de Romain

Ces pauvres fuyards prennent l'escalier en hélice

Laissant s'évaporer seuls une mère et son fils.



Un pianiste n'userait d'aucun de ses doigts

Cet ange déchu ne compte que quelques mois

C'était encor l'automne doré lorsqu'au monde il est né

Qui sait si ce n'est pas dans les rues que sa mère a crié?



Cet adolescent sans abri a ton âge

Pourrais-tu te savoir avec ce visage?

Cette petite ressemble à ta cousine,

La vois-tu vendant douceurs et clémentine?

Ce nouveau-né pourrait-être celui qui naîtra de toi

Supporterais-tu que son avenir n'ait pas de voie?



Ces gens nous font sciemment pitié, chacun le dis

Emmenant leur enfant mendier, de jour et de pluie.

Peu cherchent et lisent en eux un désespoir:

Qui userait de son enfants pour une pièce illusoire?

C'est certes ce que font certains, et c'est méprisable

Il y en a tellement... infiniment plus misérables.

Ceux-là ne mentent pas, nous font mal au coeur,

Pour cela nous les nommons manipulateurs.



Lâchez vos pianos, et vos mélodies parfaites

Écoutez donc leurs cris au dehors

Au de-là des pantoufles sur la moquette,

Ne laissez pas le malheur éclore!

Gravez un sourire sur leur lèvres désséchées

Tous ensemble, on finira pas y arriver

Traitez-moi de naïve, je revendique ce titre

En même temps je vous renverse vous et vos pupitre

Le monde dans lequel je vis est aussi bien le leur

Faîte de même, tenez à la main votre coeur.


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