Oh,
bébé, le Palais de L’Élysée
On
traînait avec des vestes en jean qui étaient en loques,
Des
vrais clodos, mais tu avait dit : «Merde ! On s'en
moque ! »
Ce neuf novembre, à
Madrid, on parlait du mur de Berlin,
Vingt-cinq ans d'un
souvenir finalement pas si lointain,
Cet événement : des
larmes de joie, un cri de liberté,
Ce soir là, peut-être un
miracle s'était réalisé,
On déambulait, cherchant
des badges de Banksy et Nirvana,
Comparant les prix des
sacs en cuir, ici ou là-bas,
On furetait entre les
stands de ce marché aux puces,
Dans la foule, un gars
égrenait des accords, chantant en russe,
On échangeait nos
impressions sur ce monde oppressant,
D'une jeunesse divisée
qui n'était plus qu'éclatements,
Des ados désabusés,
lassés d'être déboussolés,
Fatigués des mensonges
des journaux télévisés,
D'une crise qui les laisse
de côté, de cette corruption,
De contestations qui se
muent en revendications,
Alors on a décidé de se
poser au soleil,
On débattait beaucoup et
on se prêtait conseil,
Puis tu es monté sur le
banc, les bras grand-ouverts,
« Je suis le nouveau
président ! » as-tu hurlé à l'air,
Oh ! Que le Palais de
L'Elysée me donne des ailes !
Oh ! Que c'est bon
d'être élu au suffrage universel !
C'est merveilleux !
Voilà qu'enfin mon jour est arrivé !
Oh bébé, que c'est bon
d'être au Palais de l’Élysée !
Alors pour commencer, on
va faire le ménage et vite,
Virez-moi ces artistes,
ces journalistes, ces défaitistes,
Excusez-moi écoutez,
c'est pas la bonne décision,
Mais ho ! Dis-donc,
mon con, c'est qui le patron ?
C'est qui qui parle ?
C'est moi le King de la Nation
Ne te permets plus jamais
de me parler sur ce ton !
Et d'ailleurs, comme tous
les autres, pour marquer mon mandat,
Je voudrais deux grandes
tours ici et trois immeubles là-bas,
C'est pas dur, on rase
trois cités, et puis voilà,
Ça vaudra la peine un
musée à mon nom, tu verras,
Viens ma poule, allez,
t'inquiètes, je vais assurer,
Oh bébé, que c'est bon
d'être au Palais de l’Élysée ! »
Alors après ton monologue
on riait aux éclats,
On se moquait des gens qui
nous livraient ces discours là,
On se souvenait de la
Saint Jean, marchant pieds nus dans la rue,
Des nouvelles expériences,
du dernier film qu'on avait vu,
Jouant de ukulélé,
jouant les hippies décalés,
Car on est de la
génération aux jeans troués,
On est de ces addicts au
portable toujours allumé,
On est à l'âge du
ras-le-bol, du cœur sans cesse ébranlé
Mais aussi aux âmes
encore et toujours plus révoltées
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